Associer des mouvements du HUI CHUN GONG, forme très ancienne de Qi Gong taoïste, à des extraits de poésie chinoise classique, telle fut la proposition intuitive de mon atelier d’été. Quel bien m’en a fait! Et pourtant cela aurait pu paraître incongru après la torpeur du 14 juillet 2016…
En réponse au thème « Faire fleurir la part poétique énigmatique et indicible de la vie »*, explorer un dispositif mixte m’est apparu une évidence . Concrètement, il s’est agit de mettre en correspondance la présence subtile du corps avec les plus beaux poèmes de l’époque des Tang ( 618-907) dans le dessein de retrouver la joie légère de la jeunesse…
Malgré la conscience de l’apparente difficulté du protocole et des risques d’échec encourus, pourquoi n’ai je pas douté de la pertinence de cet assemblage?
Parce que cela avait du sens…
Du sens pour moi tout d’abord, de part l’envie de partager cette forme ronde de QI GONG nouvellement apprise et pour la plénitude que je ressens à la lecture de ces mots qui magnifient par le mouvement notre relation avec la nature:
« Susurre le vent: ombre, fraîcheurs Purifiant pour moi vallons et bois Il fouille, près du torrent, la fumée d’un logis Et porte la brume hors des piliers de montagne Allant, venant, sans jamais laisser de traces S’élève, s’apaise, comme mû par un désir Face au couchant, fleuve et mont se calment: Pour vous, il éveille la chant des pins »
Du sens pour les participants, qui, sonnés par le traumatisme de la violence qui s’était à nouveau abattue sur le pays, étaient venus passer des vacances … Prendre un bain de jouvence sous l’ éclairage poétique de l’imprévisibilité de la vie fut alors un bon remède à la peur, comme dans cette scène:
« Rentrant à minuit, j’ai échappé aux tigres… Sous le mont noir, à la maison, tous dorment La Grande Ourse, au loin, s’incline vers le fleuve Là-haut, l’étoile d’or, en plein ciel, s’agrandit Tremble dans la cour, cette bougie à deux flammes Je sursaute au cri du singe venu des gorges Tête blanche, encore en vie, je chante, je danse Sur ma canne, sans sommeil. Et puis, quoi ? »
Du sens pour la société, coupée de ses racines, malade du manque d’écoute portée à la part magique du monde, là, sous nos yeux…
A quoi ai- je vu que mon intuition était juste?
Aux regards plus lumineux de jour en jour des personnes embarquées dans la proposition, à la profondeur de la voix de ceux qui ont accepté de lire avec délice cette poésie de la délicatesse, à l’insouciance qui cohabite avec la concentration et l’attention lors de la petite démonstration du dernier jour à l’heure de l’apéro…
Alors, oui, je continuerai à suivre mon intuition, surtout si elle fait sens car c’est bien de sens dont tous nous avons besoin…
*Association « Jardiner ses possibles » été 2016
Références: « L’écriture poétique chinoise » François Cheng éditions Points Essai; Hui Cung Gong forme enseignée par « Le Temps du corps «
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